![]()
Index · Contenu · Introduction · Chapitre I · Chapitre II · Programmes de Sevrage · Chapitre III
Déni Médical · Professor Ashton Index · Original English Version · Autres Langues
![]()
![]()
![]()
![]()
![]()
CHAPITRE III: LES SYMPTÔMES AIGUS ET PROLONGÉS DU SEVRAGE
DES BENZODIAZÉPINES
Les Benzodiazépines: Comment agissent-elles
et comment s'en sevrer ?
PROTOCOLE À SUIVRE LORS DU SEVRAGE DES BENZODIAZÉPINES
Information sur la recherche médicale effectuée
lors du sevrage clinique des benzodiazépinesProfesseure C Heather Ashton DM, FRCP, 2002
Index
Contenu
Introduction
Chapitre I: Comment fonctionnent-elles dans notre organisme ?
Chapitre II: Comment se sevrer des benzodiazépines après un usage prolongé ?
Chapitre II: Programmes de sevrage lent
Chapitre III: Les symptômes aigus et prolongés du sevrage
CHAPITRE III
LES SYMPTÔMES AIGUS ET PROLONGÉS DU SEVRAGE DES BENZODIAZÉPINESLes mécanismes de réactions au sevrage
Les symptômes aigus du sevrage
Les symptômes individuels, leurs causes et comment y réagir
L'insomnie, les cauchemars, le sommeil agité
Les souvenirs inopportuns
Les crises d'anxiété
Anxiété généralisée, crises et phobies
Thérapies psychologiques
Techniques complémentaires - médecine douce
Exercice et différentes techniques
L'hypersensibilité sensorielle
La dépersonnalisation, la déréalisation
Les hallucinations, les illusions et les distorsions perceptives
La dépression, l'agressivité et les obsessions
Les symptômes musculaires
Les sensations corporelles
Le cœur et les poumons
Les problèmes d'équilibre
Les problèmes digestifs
Le système immunitaire
Le système endocrinien
Les crises et les convulsionsLes médicaments supplémentaires durant le sevrage d'une benzodiazépine
Les antidépresseurs
Les bêtabloquants
Les hypnotiques et les sédatifs
Les autres médicamentsL'usage d'une benzodiazépine pendant et après le sevrage
Diète, breuvage et exercice
FumerLes symptômes prolongés du sevrage
L'anxiété
La dépression
L'insomnie
Troubles sensoriels et moteurs
Mécanismes éventuels des symptômes sensoriels persistants et moteurs
Mémoire et connaissance défaillantes
Les benzodiazépines endommagent-elles la structure du cerveau ?
Les symptômes gastro-intestinaux
Vivre avec des symptômes prolongés de sevrage
Les benzodiazépines et leur temps résiduel dans l'organisme après un sevrageÉpilogue
Éducation
Recherche
Méthodes de traitement
Centre pour le sevrage
Tableau 1. Les symptômes du sevrage d'une benzodiazépine
Tableau 2. Les symptômes du sevrage des antidépresseurs
Tableau 3. Les symptômes prolongés du sevrage d'une benzodiazépine
Tableau 4. Les causes probables des symptômes prolongés du sevrage d'une benzodiazépineChapitre I décrit l'action des benzodiazépines sur l'organisme et comment se développe la tolérance et la dépendance. Le Chapitre II décrit la nécessité d'un sevrage lent et fournit des exemples pratiques de réduction lente de doses. Ce chapitre rapporte les effets des benzodiazépines éliminées de l'organisme au cours du sevrage et après celui-ci. L'attention est portée sur les symptômes du sevrage et comment réagir s'ils apparaissent.
On ne répétera jamais assez que les symptômes du sevrage peuvent être diminués et largement évités en suivant un programme adapté aux besoins de chaque individu pour réduire lentement la dose telle qu'expliqué au Chapitre II. Cependant des consommateurs de benzodiazépines à long terme commencent à ressentir des symptômes de sevrage même s'ils continuent à utiliser le médicament. C'est en partie dû au développement de la tolérance au médicament (Chapitre I) qui parfois amène les médecins à augmenter la dose ou à ajouter une autre benzodiazépine. Une analyse faite sur 50 patients qui participèrent à mon programme de sevrage des benzodiazépines indique que tous présentaient des symptômes de manque à leur première visite alors qu'ils utilisaient encore des benzodiazépines, on avait même prescrit deux benzodiazépines à douze d'entre eux. Leurs symptômes comprenaient presque tous les symptômes psychologiques et physiques habituellement décrits comme symptômes de sevrage des benzodiazépines. Le processus de réduction progressive de la dose de benzodiazépines ne causa chez ces patients qu'une légère augmentation de symptômes qui s'estompèrent après le sevrage.
Les personnes qui développent des symptômes sévères au cours d'un sevrage d'une benzodiazépine les ont souvent arrêtées brusquement. Un manque de compréhension de ces symptômes ajoute souvent à leur détresse et déclenche des peurs irrationnelles qui amplifient leurs symptômes telles que: "Suis-je en train de devenir fou ?" Quelques personnes à cause de ces terribles expériences ont souffert d'une condition semblable au syndrome du stress post-traumatique (SSPT). Une bonne compréhension des symptômes qui existent et la nature des symptômes qui apparaissent suffit pour éviter l'incompréhension et la crainte associée au sevrage d'une benzodiazépine et peut empêcher l'apparition de séquelles à long terme. Les symptômes du sevrage sont en fait une réaction normale à toute discontinuation de beaucoup de drogues chroniques utilisées incluant l'alcool, les opiacés, les antipsychotiques, les antidépresseurs et même des médicaments prescrits pour l'angine de poitrine et l'hypertension.
Les mécanismes de réactions au sevrage. En général, les réactions dues aux drogues utilisées lors d'une période de sevrage ont tendance à être représentées comme le miroir des effets produits par les drogues initiales. Dans le cas des benzodiazépines, un usage chronique de celles-ci ayant produit un sommeil sans rêve, suivi d'un arrêt brusque, peut être remplacé par de l'insomnie et des cauchemars. Une relaxation musculaire peut être remplacée par une forte tension et des spasmes musculaires; une sérénité de l'esprit par de l'anxiété et des crises d'anxiété ou tout comme aucun problème de convulsions peut être remplacé par des crises d'épilepsie. C'est l'exposition à des adaptations brusques exigées du système nerveux qui est à l'origine de ces réactions contraires. Un arrêt trop rapide de la drogue ouvre les portes à toutes les fluctuations et le résultat est un surcroît d'activité à tous les niveaux qui, jusqu'à présent avaient été diminués par la présence de la benzodiazépine et qui, désormais, n'ont rien qui les désactive. Presque tous les mécanismes excitables du système nerveux sont en état d'effervescence et doivent se réadapter à vivre sans drogue ce qui les rend très vulnérable au stress.
Les symptômes aigus du sevrage. L'effet recherché le plus éminent des benzodiazépines est le contrôle de l'anxiété. C'est pour cette raison qu'elles furent développées en tant que tranquillisants. En conséquence, près de la totalité des symptômes aigus de sevrage sont ceux reliés à l'anxiété. On avait décrit ces symptômes chez les personnes anxieuses et qui n'avaient jamais touché à une benzodiazépine. Ils avaient déjà été reconnus comme étant des symptômes psychologiques et physiques de l'anxiété bien avant la découverte des benzodiazépines. Cependant certains groupes de symptômes sont particulièrement identifiés au sevrage d'une benzodiazépine. Ceux-ci comprennent l'hypersensibilité aux stimulus sensoriels (le son, la lumière, le toucher, le goût et l'odorat) et les distorsions perceptives (comme par exemple l'impression de l'ondulation du plancher, la sensation de mouvement, l'inclinaison des murs ou des planchers, l'impression de marcher sur des nuages. Il y a une plus forte incidence de ces problèmes par rapport à ce qui est normalement perçue lors des états d'anxiété de dépersonnalisation, d'irréalité, de picotements et d'engourdissements. Des hallucinations visuelles, des distorsions de l'image corporelle (ma tête ressemble à un ballon de football), des impressions d'insectes se déplaçant sur la peau, des muscles qui sautent et une perte de poids sont communs dans le sevrage d'une benzodiazépine mais sont inhabituels dans les états d'anxiété.
Le Tableau 1 vous liste les symptômes qui furent décrits spontanément par des patients qui participèrent à mon programme de sevrage. C'est une liste inévitablement longue et sûrement incomplète. Bien entendu, tous les patients n'éprouvent pas tous les symptômes, tout comme pas un de ces symptômes n'est inévitable. Le sevrage semble faire ressortir les points les plus vulnérables de l'individu. Si celui-ci est sujet aux maux de tête, ceux-ci apparaissent plus intenses lors du sevrage. Si l'individu est sujet à des troubles intestinaux, ces derniers peuvent s'aggraver. De tels symptômes sont, en général, temporaires et peuvent être minimisés. Ils sont moins effrayants et semblent moins importants ou bizarres si on en comprend leurs causes. De plus, les patients peuvent apprendre des techniques afin d'alléger ou de contrôler la plupart de ces symptômes. Il y a beaucoup de moyens disponibles pour les aider.
TABLEAU 1. LES SYMPTÔMES DU SEVRAGE D'UNE BENZODIAZÉPINE
LES SYMPTÔMES "PSYCHOLOGIQUES"
Excitabilité (sursaut, agitation)
Insomnie, les cauchemars et les autres troubles du sommeil
Augmentation de l'anxiété et des crises d'anxiété
Agoraphobie et une phobie sociale
Distorsions perceptives
Dépersonnalisation, déréalisation
Hallucinations, des manques de perception
Dépression
Obsessions
Pensées paranoïaques
Rage, agressivité, irritabilité
Mémoire et cognition faibles
Souvenirs inopportuns
Envies (rare)LES SYMPTÔMES "PHYSIQUES"
Maux de tête (Céphalée)
Douleur/une raideur - (membres, dos, cou, dents et mâchoires)
Picotement, engourdissement, sensation altérée - (membres, visage, thorax)
Faiblesse ("jambes en coton")
Fatigue, symptômes de la grippe
Contractions musculaires, convulsions, tics, "chocs électriques"
Tremblements
Vertige, étourdissement, manque d'équilibre
Troubles de la vision/vision double, douleur ou sécheresse oculaire
Acouphène
Hypersensitivité - (lumière, son, toucher, goût, odorat)
Symptômes gastro-intestinaux - (nausée, vomissement, diarrhée,
constipation, douleur, distention, difficulté à avaler)
Appétit/variation du poids
Sécheresse buccale, goût métallique, odeur inhabituelle
Bouffées de chaleur/Sueurs/Palpitations
Essoufflement
Difficulté urinaire/menstruelle
Éruption cutanée, démangeaison
Convulsions (rare)Tous ces symptômes ont été décrits par des patients qui ont subi un sevrage d'une benzodiazépine; ils ne sont pas classés en ordre spécifique et peu d'entre eux, si ce n'est aucun, sont spécifiques au sevrage d'une benzodiazépine. Cette liste n'est pas exhaustive. Différentes personnes vivront une combinaison tout autre de symptômes. Vous ne les aurez pas tous et pas tous en même temps !
LES SYMPTÔMES INDIVIDUELS, LEURS CAUSES ET COMMENT Y RÉAGIR
L'insomnie, les cauchemars et le sommeil agité. Le sommeil engendré par les benzodiazépines, bien qu'il semble d'abord bienfaisant, n'est pas un sommeil normal. Les benzodiazépines inhibent à la fois le rêve (le mouvement rapide de l'œil, REMS) et le sommeil profond (phase lente du sommeil, SWS). Le temps de sommeil supplémentaire que les benzodiazépines offrent se déroule principalement en sommeil léger, ce qui représente la seconde phase du sommeil. REM et SWS sont les deux plus importantes phases du sommeil essentielles à notre santé. Des études sur le manque de sommeil indiquent que toute déficience est rapidement remplacée par une récupération à des niveaux supérieurs à la normale dès que les circonstances le permettent.
Dans le cas des personnes qui utilisent une benzodiazépine régulièrement, le REMS et le SWS ont tendance à revenir au niveau précédent l'utilisation de la benzodiazépine, à cause de la tolérance, mais la perte initiale reste la même. Durant le sevrage, même après des années d'utilisation d'une benzodiazépine, il y a une augmentation notable dans l'augmentation de REMS qui devient aussi plus profond. En conséquence, les rêves deviennent plus agités, les cauchemars peuvent apparaître et causer de fréquents réveils durant la nuit. C'est une réaction normale au manque de benzodiazépine et, bien que déplaisante, c'est un signe précurseur du début de la guérison. Quand la perte de REMS est compensée, en principe entre 4 et 6 semaines, les cauchemars deviennent moins fréquents et disparaissent progressivement.
Le retour du SWS semble être plus long après un sevrage, probablement dû au fait que les niveaux d'anxiété sont élevés, le cerveau est trop actif et par conséquent il est difficile de relaxer complètement. Les sujets peuvent éprouver de la difficulté à s'endormir et expérimentent "le syndrome des jambes agitées", des spasmes musculaires soudains (myoclonus) alors qu'ils s'allongent ou encore ils peuvent être en présence d'une hallucination subite d'un son aigu (hallucination hypnagogique) ce qui les réveille à nouveau. Ces dérangements peuvent durer parfois pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois.
Cependant, tous ces symptômes s'apaisent avec le temps. Le besoin de dormir est si puissant qu'éventuellement un sommeil normal s'installera. Entre temps, une attention toute particulière de l'hygiène de vie sera à respecter comme éliminer la consommation du thé, du café ou d'autres stimulants et d'alcool près de l'heure du coucher. Par contre l'écoute de cassettes relaxantes, de techniques de contrôle sur l'anxiété et des exercices physiques pourront aider à dormir. Absorber toute la dose ou la majeure partie la dose d'une benzodiazépine le soir pendant la période de diminution peut aussi être efficace. On peut prescrire à l'occasion une autre drogue (voir ci-dessous la section concernant les drogues adjuvantes).
Les souvenirs inopportuns. Chez les patients en sevrage d'une benzodiazépine, le symptôme fascinant dont ils parlent souvent sont les souvenirs inopportuns. Leurs pensées évoqueront subitement un souvenir précis de quelqu'un dont ils sont sans nouvelles depuis des années. Parfois le visage d'une autre personne apparaîtra alors qu'il se regarde dans un miroir. Le souvenir semble être injustifié et peut revenir en faisant intrusion dans d'autres pensées. Ce qui est intéressant au sujet de ces souvenirs, c'est que souvent ils surviennent en même temps qu'apparaissent les rêves agités; ils peuvent être décalés d'une à deux semaines dès que la réduction progressive de la dose commence. Étant donné qu'une étude récente sur le sommeil indique que certains paliers du sommeil (REMS et SWS) sont importants relativement aux fonctions de la mémoire, cela établirait que les rêves et les souvenirs sont liés. Dans les deux cas, le phénomène peut engendrer le début du retour des fonctions normales de la mémoire et, bien que parfois déplaisant, peut être vu comme un signe annonciateur de la guérison.
Une mémoire défaillante et une concentration faible font aussi partie du sevrage d'une benzodiazépine et sont probablement dues aux effets continus du médicament. Les mentors devraient être prêts à formuler sans cesse des encouragements, semaine après semaine étant donné que leurs conseils sont rapidement oubliés.
Les crises d'anxiété. Les crises d'anxiété peuvent apparaître pour la première fois durant la période de sevrage même si certaines personnes ont une très grande expérience avec ces crises. L'actrice Glenda Jackson, qui n'utilisait pas des benzodiazépines, les décrivait ainsi: "Mon Dieu, ces crises d'anxiété". Vous croyez que vous allez mourir; votre cœur bat si fort que vous pensez qu'il va exploser. Vous étouffez et il semble que vous ne pouvez plus respirer et tout ceci est accompagné par des tremblements et de secousses affreuses ainsi que par une sensation de froid intense" (Sunday Times Magazine p. 15, October 17, 1999). Ces crises sont les caractéristiques d'états d'anxiété et sont le résultat de troubles de l'hyperactivité centrale et périphérique du système nerveux. Surtout les centres qui sont normalement concernés par les réactions relatives à la peur et à la fuite face à des situations d'urgence. Les centres du cerveau qui contrôlent ces réactions de peur ont été minimisés par les benzodiazépines et peuvent être suractivés au moment du sevrage des benzodiazépines..
Aussi épouvantables qu'elles soient, les crises d'anxiété ne sont jamais fatales et ne durent habituellement pas plus de 30 minutes. Ce qui est mieux, c'est qu'il est possible d'apprendre à faire des exercices afin de les contrôler. Des approches variées telles que des techniques de relaxation, des exercices respiratoires parce que plusieurs patients hyperventilent, un entraînement afin de développer des habilités pour contrôler l'anxiété, une thérapie cognitive, des exercices physiques, des massages et du yoga aident les patients. Apprendre à contrôler une crise d'anxiété est une habilité qui s'améliorera avec l'entraînement et sur laquelle on doit travailler soi-même. Cependant, les crises d'anxiété (tout comme d'autres symptômes de sevrage) posent un défi lorsqu'elles apparaissent à des moments inappropriés et hors de chez soi. Dans de telles circonstances il est important que vous teniez bon, que vous résistiez à l'impulsion de vous enfuir. Le Dr Peter Tyrer suggère la stratégie suivante si un grave symptôme de sevrage telle qu'une crise d'anxiété apparaît alors que vous poussez un chariot dans un supermarché:
"Prenez des grandes respirations lentes et profondes afin de bien faire pénétrer l'air profondément dans vos poumons au lieu de seulement dans le haut de votre cage thoracique."
"De cette façon, vous remarquerez que vos bras et vos jambes se relaxent tellement que le blanc de vos jointures de doigts n'apparaît plus alors que vous vous agrippez à la barre du chariot."
"Ne bougez plus jusqu'à ce que vous sentiez la tension quitter vos mains. À chaque inspiration profonde, vous devriez sentir une réduction de la tension et en le faisant, vos symptômes s'amoindriront ou disparaîtront."
Peter Tyrer, How to Stop Taking Tranquillisers, Sheldon Press, London 1986, p.63.
Le fait de découvrir qu'une crise d'anxiété peut être contrôlée, sans l'aide d'un comprimé, accroît la confiance en soi, tout comme le développement de nouvelles stratégies pour vivre avec le stress qui est la clé du succès du sevrage d'une benzodiazépine. Habituellement, les crises d'anxiété disparaissent au bout de six semaines de sevrage.
Anxiété généralisée, crises et phobies. Il y a plusieurs techniques de médecine douce pour aider les gens qui souffrent d'anxiété. Quelques-unes de ces techniques sont listées ci-dessous. Il faut se rappeler que nous ne pouvons ici décrire toutes les techniques en détail et que nous n'en mentionnons que quelques-unes. Aucune connaissance obligatoire de ces techniques n'est nécessaire pour arrêter de consommer ces tranquillisants mais elles peuvent aider certaines personnes lors de périodes plus difficiles.
(1) Thérapies psychologiques
Thérapie du comportement
Vise l'apprentissage de nouveaux comportements face à une mauvaise réaction vis-à-vis une situation donnée.
Une relaxation progressive des muscles (qui réduit la tension des muscles et l'anxiété).
Respiration par le diaphragme (plusieurs personnes anxieuses souffrent d'hyperventilation).
Imagerie dirigée (centrée sur des situations plaisantes et relaxantes; cassettes relaxantes de musique et de paroles calmantes peuvent aussi être utilisées à la maison).
Une exposition graduelle à une situation créant de la peur et de l'anxiété pour permettre de diminuer cette peur incontrôlée. Thérapie du comportement cognitif
Permets aux patients de comprendre leur manière de penser pour réagir différemment face à des situations traumatisantes pour eux.
Permets de mieux contrôler différentes situations en contrôlant l'anxiété, de les éviter et de mieux les contrôler lorsqu'on ne peut les éviter.
Permets de refaire l'apprentissage pour la correction du comportement cognitif. (2) Techniques complémentaires - médecine douce
Acupuncture
Aromathérapie
Massage, réflexologie
Homéopathie (3) Exercice et différentes techniques
Sports - aérobie, course, natation, "pilates" marche ou toutes autres activités récréatives
Yoga - toutes les écoles de yoga et toutes les différentes techniques
Méditation - toutes les écoles de méditation Le choix et les résultats obtenus par ces différentes options dépendent des individus qui les pratiquent. Les différentes méthodes psychologiques ont été officiellement testées et donnent les meilleurs résultats à long terme. Cependant, les résultats dépendent beaucoup de l'habilité des thérapeutes, de leurs connaissances des benzodiazépines, en plus de la relation interpersonnelle qu'ils développent avec leurs clients.
Toutes les techniques complémentaires de médecine douce peuvent aider lors du traitement mais les effets demeurent de courte durée. Par exemple, tous les patients de ma clinique ayant suivi une série de 12 traitements d'acupuncture utilisant la méthode chinoise ou occidentale ont apprécié grandement la relaxation lors de ces sessions mais ils n'ont pas mieux réussi à long terme que ceux qui n'avaient pas reçu de traitements d'acupuncture.
Certaines personnes répondent mieux au yoga ou à la méditation. Un individu en particulier qui était confiné à un fauteuil roulant, souffrant d'une paralysie spasmodique et qui était aveugle, a réussi à cesser l'utilisation de toutes ces benzodiazépines à l'aide d'une technique de méditation. Le contrôle de ses spasmes s'est amélioré considérablement. Cependant, ce n'est pas tout le monde qui peut fournir un tel effort mental et physique de concentration nécessaire pour que cette technique réussisse. Par contre, l'exercice physique adapté à chaque individu est bon pour tous.
En général, chacun adapte à ses besoins les différentes méthodes proposées. Si vous pratiquez une méthode que vous connaissez et appréciez, elle sera la meilleure pour vous.
L'hypersensibilité sensorielle. Une particularité du sevrage d'une benzodiazépine est la très forte sensibilité à toutes sensations - l'ouïe, la vue, le toucher, le goût et l'odorat. Quand elles sont extrêmes, celles-ci peuvent être inquiétantes. Une femme a dû arrêter toutes les pendules dans sa maison parce qu'elle ne pouvait plus supporter le bruit du tic-tac. Plusieurs ont dû même porter des verres fumés parce que la lumière ordinaire leur paraissait éblouissante. Certains trouvent que leur peau et leur cuir chevelu deviennent tellement sensibles que cela leur semble être des mouvements d'insectes. Les battements de cœur deviennent auditifs et il peut y avoir un sifflement ou un son de cloche au niveau des oreilles (acouphène - voir ci-dessous). Beaucoup de personnes se plaignent d'un goût métallique et plusieurs remarquent que des odeurs bizarres et désagréables semblent émaner de leur corps. Ces sensations, y compris l'odeur désagréable (qu'habituellement personne ne détecte) ont été décrites dans des états d'anxiété et en l'absence de benzodiazépines. Comme pour les insomnies et les crises d'anxiété, elles sont probablement la réflexion d'une forte activité du système nerveux central. Une telle hypersensibilité fait partie d'une peur normale et d'une réponse rapide en cas d'urgence laquelle est diminuée par les benzodiazépines mais connaît un surcroît d'activité lors du sevrage.
Ces sensations reviennent à la normale alors que le sevrage progresse et quelques personnes en sont heureuses et trouve fascinant la clarté de leurs perceptions. Ce n'est qu'en période de sevrage qu'elles réalisent combien leurs sens avaient été atténués par les benzodiazépines. Une femme a décrit combien elle fût émue quand elle put distinguer les brins d'herbe individuels de sa nouvelle pelouse. Ce fut comme si un voile avait été enlevé devant ses yeux. Ces sensations ne doivent pas faire peur; elles doivent être vues comme les indices d'une guérison.
La dépersonnalisation, la déréalisation. On associe les états de dépersonnalisation et de déréalisation au sevrage d'une benzodiazépine, bien qu'ils apparaissent aussi pendant les crises d'anxiété. Ils apparaissent le plus souvent lors d'un sevrage ultra-rapide de benzodiazépines fortes et sont, en évidence, particulièrement remarquables dans le sevrage du clonazépam (Klonopin, Rivotril). Au cours de ces états, la personne semble se détacher de son corps et paraît presque l'observer de l'extérieur. Des situations similaires sont décrites lors d'expérience de mort éminente (EMI) alors que l'individu sent qu'il s'élève au-dessus de son corps, détaché des événements qui se déroulent en dessous. Les personnes les décrivent aussi dans des cas d'extrêmes urgences ainsi que chez des individus soumis à la torture. Ils ne sont manifestement pas spécifiques aux benzodiazépines.
De telles expériences indiquent probablement une réaction normale de défense qui protège contre une souffrance intolérable. Elles peuvent impliquer un mécanisme primitif du cerveau similaire à celui des animaux qui restent figés sur place en présence d'un danger inattendu. Comme les autres symptômes de sevrage d'une benzodiazépine, ces états disparaissent avec le temps et ne devraient pas être interprétés comme anormaux ou déplacés.
Les hallucinations, les illusions et les distorsions perceptives. Le symptôme de sevrage d'une benzodiazépine qui cause le plus de peur est celui de l'hallucination. Des hallucinations terrifiantes ont eu lieu chez des personnes qui se sevrait d'une forte dose rapidement ou brusquement. Le lecteur peut être réassuré que ces cas cités sont extrêmement rares lors de la diminution progressive des dosages comme souligné au Chapitre II. Si des hallucinations apparaissent, elles sont généralement visuelles. Les patients ont décrit ces hallucinations comme étant celles d'une grosse chauve-souris posée sur leur épaule ou encore celle de l'apparition de cornes sortant de la tête d'un individu mais des hallucinations auditives, olfactives et tactiles peuvent aussi apparaître. Un peu moins apeurant, sont les hallucinations de petites créatures, habituellement des insectes, qui peuvent se déplacer sur la peau (des hallucinations similaires apparaissent durant le sevrage de la cocaïne et d'une amphétamine). Parfois, les hallucinations sont mêlées à des illusions et à de fausses perceptions. Par exemple, un manteau accroché à la porte peut donner l'illusion d'une personne. Les planchers qui semblent s'incliner et les murs qui semblent être en pente vers l'intérieur sont des perceptions visuelles.
Les mécanismes de ces symptômes bizarres sont probablement similaires à ceux qui causent le delirium tremens (les hallucinations, tel que des éléphants ou des rats roses, dans le "DTs" sevrage de l'alcool). Comme nous l'avons mentionné au Chapitre I, les benzodiazépines provoquent des perturbations profondes dans tout le cerveau et un sevrage brusque (rapide) peut être accompagné d'un déclenchement de dopamine, de sérotonine et d'autres neurotransmetteurs lesquels causent des hallucinations dans les cas de maladies psychotiques tout comme dans les cas du sevrage de l'alcool, de l'abus de la cocaïne, de l'amphétamine et du LDS.
Quand les hallucinations très réelles au début sont reconnues comme n'étant que de simples hallucinations, elles font moins peur. Elles ne sont pas un signe de folie mais sont simplement des exemples que les benzodiazépines agissent au niveau du cerveau lequel devra se rééquilibrer avec le temps. Un bon conseiller est capable de rassurer et de calmer la personne qui souffre d'hallucinations amenées par le sevrage des benzodiazépines. Dans tous les cas, les risques d'hallucinations sont infimes lors d'un sevrage lent d'une benzodiazépine.
La dépression, l'agressivité et les obsessions. Les symptômes de dépression sont communs durant l'usage à long terme d'une benzodiazépine et durant le sevrage. Il n'est guère surprenant que des patients se sentent déprimés, considérant l'amalgame de symptômes psychologiques et physiques qui peut les assaillir. Parfois, la dépression devient tellement sévère qu'on peut la qualifier en terme psychiatrique de dépression majeure. Cet état peut engendrer un risque de tentative de suicide et peut demander un traitement à base de médicaments antidépresseurs et/ou une psychothérapie.
Une sévère dépression peut être le résultat de changements biochimiques au niveau du cerveau provoqués par les benzodiazépines. Les benzodiazépines sont reconnues pour réduire l'activité de la sérotonine et de la norépinéphrine, ces neurotransmetteurs que l'on sait être impliqués dans la dépression. Les médicaments antidépresseurs qui ravivent les inhibiteurs (SSRIs tel le Prozac) sont reconnus pour avoir une action qui augmente l'activité de ces dits neurotransmetteurs.
Lors du sevrage, la dépression peut se prolonger (voir la section sur les symptômes prolongés) et si la personne ne s'apaise pas en quelques semaines et si elle reste insensible à la réassurance et aux encouragements, il est impératif d'aller chercher de l'aide médicale et de prendre possiblement un antidépresseur (voir la section sur les médicaments complémentaires). La dépression au cours d'un sevrage, réagit aux médicaments antidépresseurs de la même manière que lors de dépression ordinaire sans benzodiazépines. Tel que dans la majorité des cas, un médicament antidépresseur est déjà absorbé avec la benzodiazépine, il est important de continuer de le prendre jusqu'au sevrage complet de la benzodiazépine. On pourra considérer plus tard le sevrage de l'antidépresseur.
Des problèmes d'agressivité sont aussi associés à l'activité lente de la sérotonine (parmi d'autres facteurs), à l'apparition de la colère puis de l'irritabilité durant le sevrage d'une benzodiazépine ce qui peut engendrer des mécanismes similaires à ceux de la dépression. Cependant, ces symptômes disparaissent habituellement de façon spontanée et ne durent pas longtemps. Des maladies obsessionnelles (la maladie obsessionnelle compulsive, MOC) peuvent, elles aussi, réagir aux SSRIs, suggérant un mécanisme similaire. Les traits obsessionnels peuvent avoir augmenté temporairement durant le sevrage et semblent être le reflet d'un mélange d'anxiété et de dépression. Ceux-ci ont tendance à régresser spontanément alors que les niveaux d'anxiété diminuent.
Les symptômes musculaires. Les benzodiazépines sont des relaxants musculaires efficaces et on les utilise pour des conditions spasmodiques ou de désordres au niveau de la moelle épinière jusqu'à l'atroce spasme musculaire du tétanos ou de la rage. Il n'est par conséquent pas surprenant que la discontinuation au bout d'un très long usage soit associée à une augmentation importante de la tension musculaire. Cette tension trop forte fait partie des nombreux symptômes observés au cours d'un sevrage d'une benzodiazépine. Avoir une raideur musculaire qui touche les membres, le dos, le cou et les mâchoires est remarquée couramment et la tension musculaire constante justifie les douleurs musculaires qui se répartissent de la même manière. Habituellement, les maux de tête qui sont liés au genre de "mal de tête dû au stress", sont dus à la constriction des muscles situés au bas du cou, du crâne et du front souvent décrite comme si on portait un bandeau serré autour de la tête. La douleur au niveau des mâchoires et des dents est probablement due aux grincements de dents involontaires qui se produisent souvent inconsciemment durant le sommeil.
Au même moment, les nerfs des muscles sont hyperexcités ce qui amène des tremblements, des tics, des sursauts, des spasmes, des contractions et des sauts au moindre stimulus. Toute cette activité constante apporte un sentiment de fatigue et de faiblesse ("les jambes en coton"). De plus, les muscles, en particulier les petits muscles de l'œil, ne sont pas bien coordonnés ce qui peut entraîner une vision floue ou double et peut-être même des sauts au niveau de la paupière (blépharosplasme).
Aucun de ces symptômes n'est alarmant et ne doit causer de craintes une fois bien compris. La douleur et la raideur musculaires sont légèrement peu différentes de ce que l'on considère comme étant normal après un exercice physique dont on est peu accoutumé et qui serait accepté positivement même chez des athlètes entraînés qui auraient couru un marathon.
Il y a plusieurs précautions à prendre pour apaiser ces symptômes, comme par exemple des exercices de réchauffement musculaire tels qu'enseignés dans la majorité des gymnases, des exercices modérés, des bains chauds, des massages et des exercices de relaxation générale. De telles précautions peuvent, au début, provoquer un bienfait temporaire mais si, pratiquées régulièrement, elles peuvent accélérer la vitesse de guérison du tonus musculaire lequel se fera éventuellement de façon spontannée.
Les sensations corporelles. Toutes sortes de sensations étranges, de membres engourdis, picotements, sensations de chocs électriques, sensations de chaud ou froid, douleurs profondes de brûlements, on se gratte constamment, sont communes pendant le sevrage d'une benzodiazépine. Il est difficile de donner une explication exacte à ces sensations mais, tout comme les nerfs moteurs, lors du sevrage, les nerfs sensoriels deviennent, avec leurs connexions au niveau de la colonne vertébrale et du cerveau, hyperexcités. Il est possible que les récepteurs sensoriels de la peau et des muscles ainsi que les tissus qui enveloppent les os provoquent des pulsions de manière chaotique en réponse à un stimulus qui, normalement, ne les affecte pas.
Dans ma clinique, les études faites au sujet de la condition nerveuse des patients qui présentaient de tels symptômes n'ont révélé rien d'anormal. Par exemple, ils n'y avaient aucune évidence de névrites périphériques. Cependant, les symptômes furent parfois assez présents pour embrouiller les neurologues. Trois patients qui présentaient un mélange d'engourdissements, de spasmes musculaires et de vision double furent diagnostiqués comme ayant la sclérose en plaques. Ce diagnostic ainsi que tous les symptômes disparurent peu de temps après avoir cesser l'utilisation de leurs benzodiazépines.
Pourtant, ces symptômes, bien que déroutants, ne présentent habituellement aucune inquiétude. Ils peuvent persister à l'occasion (voir la section sur les symptômes persistants). En attendant, les mêmes précautions suggérées dans le paragraphe des symptômes musculaires (ci-dessus) peuvent les diminuer de beaucoup et, en général, les symptômes disparaîtront après le sevrage.
Le cœur et les poumons. Les palpitations, les battements forts, le pouls rapide, les bouffées de chaleur, les sueurs et le manque de souffle représentent les signes accompagnateurs des crises d'anxiété bien qu'elles puissent survenir sans celles-ci. Ils ne signifient pas une maladie cardiaque ou pulmonaire mais simplement l'expression d'une réaction excessive du système nerveux autonome. Des respirations lentes et profondes en plus d'une relaxation, telles que décrites dans le paragraphe des crises d'anxiété, peuvent contrôler beaucoup de ces symptômes. Ne vous en inquiétez pas. Ils seraient acceptés comme étant normaux si vous aviez couru pour attraper un autobus et ils ne vous feraient pas plus de mal que si vous le faisiez en réalité !
Les problèmes d'équilibre. Durant un sevrage, des personnes notent qu'elles ressentent un sentiment d'instabilité sous leurs pieds. Parfois, il leur semble qu'elles soient poussées d'un côté ou qu'elles se sentent étourdies, comme si ce qu'il y avait autour d'elles se mettait à tourner sans cesse. L'organe important qui contrôle la stabilité motrice et qui maintient l'équilibre est situé dans une partie du cerveau appelée le cerebella. Cet organe est rempli de GABA et de récepteurs de benzodiazépine (voir le Chapitre I) et est donc le site principal des réactions aux benzodiazépines. Des doses excessives de benzodiazépines, telles que l'alcool, provoquent une instabilité dans une démarche gauchère, une mauvaise articulation et une mauvaise coordination générale, y incluant une impossibilité de marcher en ligne droite. Cela peut prendre du temps aux systèmes cérébraux de se stabiliser à nouveau après le sevrage d'une benzodiazépine et les symptômes peuvent durer jusqu'à la fin du processus. Des exercices comme se mettre sur une jambe, d'abord avec les yeux ouverts puis avec les yeux fermés peuvent accélérer la guérison.
Les problèmes digestifs. Il y a des personnes qui ne ressentent aucun problème digestif pendant ou après le sevrage il arrive aussi qu'elles puissent mieux goûter leur nourriture. D'autres, peut-être plus sujettes par nature, se plaignent d'une série de symptômes associés au "syndrome des troubles digestifs". Ceux-ci peuvent comprendre la nausée, les vomissements, la diarrhée, la constipation, les douleurs abdominales, la flatulence, les distensions gazeuses et les brûlures d'estomac. Plusieurs patients ont trouvé ces symptômes tellement inconfortables qu'ils en ont éprouvé le besoin d'avoir recours à des examens gastro-intestinaux au cours desquels aucune anomalie n'a été décelée. Les symptômes peuvent être dus en partie à une réaction excessive du système nerveux autonome lequel contrôle la mobilité et les sécrétions intestinales qui sont très sensibles au stress y compris le stress encouru lors du sevrage d'une benzodiazépine. De plus, il y a des récepteurs de benzodiazépines dans les intestins. On ne connaît pas encore tout à fait la nature et la fonction de ces récepteurs, la façon dont ils sont affectés par les benzodiazépines ou par le sevrage de ces dernières, mais d'éventuelles altérations à leur niveau peuvent jouer un rôle dans le développement de l'irritabilité intestinale.
Pendant le sevrage, une perte de poids considérable peut se produire (8 à 10 livres ou plus). Ceci est peut-être dû à l'effet opposé de l'appétit étant donné que les benzodiazépines ont montré une augmentation de l'appétit chez les animaux. Par contre, il y a des personnes qui prennent du poids durant le sevrage. Dans tous les cas, les changements au niveau du poids ne sont pas assez sévères pour être inquiétants et un poids normal revient assez tôt une fois le sevrage complété. Un petit nombre de personnes a du mal à avaler la nourriture, la gorge semble se resserrer surtout lors d'un repas entre convives. C'est habituellement un signe d'anxiété ce qui est bien connu dans les états d'anxiété. La pratique de la relaxation, de manger seul, d'avaler de petites bouchées, bien mâchées accompagnées d'une gorgée de liquide ainsi que de ne pas se presser semblent faciliter les choses et apaisent les symptômes tandis que les niveaux d'anxiété diminuent.
La plupart des symptômes digestifs s'améliorent après le sevrage mais chez quelques individus ils persistent et se transforment en un symptôme prolongé, soulevant des inquiétudes laissant penser à une allergie à un aliment ou une infection de type candida. Ces questions seront discutées plus loin dans la section relatant des symptômes prolongés.
Le système immunitaire. "Pourquoi j'attrape autant d'infections ?" Cette question est souvent posée par des patients qui subissent un sevrage de benzodiazépines. Ils semblent sujets aux rhumes, aux sinusites, aux otites, aux cystites, aux infections orales et vaginales (candida) ainsi qu'à d'autres infections de la peau et des ongles, aux lèvres gercées, aux aphtes et à la grippe. Toutes aussi communes sont les plaintes aux diverses réactions des antibiotiques utilisées lors du traitement des infections bactériennes.
Il n'est pas évident la relation de l'augmentation des infections chez les personnes qui subissent le sevrage d'une benzodiazépine parce qu'aucune comparaison n'a été établie avec d'autres patients similaires mais qui n'ont pas été exposés aux benzodiazépines. Cependant, beaucoup de facteurs affectent le système immunitaire. L'un d'entre eux est le stress accompagné d'une augmentation de la production de l'hormone de stress, le cortisol, lequel inhibe les réactions immunitaires. Un autre facteur est la dépression, liée aussi au stress et associée à une augmentation de la sécrétion de cortisol. Des niveaux élevés de cortisol peuvent diminuer la résistance aux infections et causer des infections soudaines. Le sevrage d'une benzodiazépine peut être très stressant mais, curieusement, chez les patients que j'ai vérifiés, les concentrations de cortisol dans le sang étaient faibles. Donc, ce sujet reste un mystère et requiert certainement d'autres recherches plus avancées. Le message adressé aux personnes qui subissent le sevrage d'une benzodiazépine est d'essayer d'avoir une hygiène de vie saine incluant une alimentation équilibrée, beaucoup d'exercices et de repos et le soin d'éviter autant que possible tout stress supplémentaire. Une diminution progressive des doses (Chapitre II) est la meilleure façon de réduire le stress lié au sevrage.
Le système endocrinien. Les benzodiazépines affectent sûrement aussi le système endocrinien mais aucune étude n'a été faite sur les humains que ce soient durant l'utilisation des benzodiazépines ou durant la période de sevrage. Plusieurs femmes se plaignent de douleurs menstruelles mais comme l'on retrouve ces plaintes parmi toute la population féminine en général, il n'y a aucun rapport évident attribuable directement aux benzodiazépines. Plusieurs femmes ayant utilisé des benzodiazépines sur une longue période ont subi une hystérectomie, mais même là, il n'y a aucun rapport à long terme directement relié à leurs utilisations. À l'occasion, cependant, des hommes et des femmes prenant des benzodiazépines se sont plaints du gonflement de leurs seins ou d'enflure, donc nous croyons possible que les benzodiazépines provoquent une augmentation de l'hormone prolactine. Les problèmes endocriniens provoqués par la prise de benzodiazépines cessent à l'arrêt de ces tranquillisants.
Les crises et les convulsions. Les benzodiazépines sont des anticonvulsifs puissants. Ils peuvent sauver la vie en cas d'états épileptiques (crises répétées l'une après l'autre) et en cas de crises causées par le surdosage de certains médicaments (par exemple, les antidépresseurs tricycliques). Cependant, un sevrage brusque (rapide), surtout de benzodiazépines puissantes, peut précipiter des crises d'épilepsie comme un retour de la réaction. Une telle situation est extrêmement rare lors d'une élimination lente des benzodiazépines (ex le diazépam) ou lors d'une diminution lente et progressive du dosage. Si, dans ces circonstances, une crise se déclenche, il s'agit seulement d'une crise unique qui ne cause aucun dommage permanent. On a noté d'autres phénomènes tels que des symptômes psychotiques, une sévère confusion et un delirium lors d'un sevrage rapide mais une fois de plus, ces derniers n'apparaissent pas au cours d'une diminution lente et progressive du dosage. En suivant les étapes listées dans le Chapitre II, vous pouvez être sûr d'éviter ces complications.
LES MÉDICAMENTS SUPPLÉMENTAIRES DURANT LE SEVRAGE D'UNE BENZODIAZÉPINE
Cependant, il existe des drogues qui peuvent contrôler des symptômes particuliers du sevrage et qui demandent à être considérées dans certaines situations bien que non recommandables pour un usage régulier. Habituellement, elles ne seront administrées que temporairement mais elles peuvent parfois faciliter une situation difficile et permettre au patient de poursuivre le programme de sevrage.
Les antidépresseurs. Les antidépresseurs sont les drogues les plus importantes à ajouter durant un sevrage. Comme mentionné auparavant, la dépression peut devenir un problème réel au cours du sevrage et peut parfois être si sévère, qu'elle peut poser un risque de suicide, bien que ce soit rare lors d'une diminution lente et progressive. Comme dans toute dépression, la dépression lors du sevrage réagit aux médicaments antidépresseurs et est probablement causée par les mêmes modifications chimiques du cerveau. Ensemble, les antidépresseurs "ancienne mode" (doxepine [Sinéquan], amitriptyline [Elavil]) et les inhibiteurs du rebond de la sérotonine sélective (SSRIs; fluoxétine [Prozac], paroxétine [Paxil, Déroxat]) peuvent être effectifs et un médicament antidépresseur peut être prescrit si la dépression est sévère. Il existe une école de pensée, surtout parmi les anciens ex-utilisateurs des tranquillisants, qui est opposée à l'absorption de d'autres médicaments pendant le sevrage. Mais on a enregistré des suicides lors de plusieurs essais cliniques du sevrage d'une benzodiazépine. Si une dépression est diagnostiquée sévère au cours du sevrage d'une benzodiazépine comme dans toute autre situation, cela serait de la folie de ne pas la traiter.
Cependant, il y a des désavantages avec les antidépresseurs. Le premier est que cela prend entre 2 à 3 semaines ou plus, pour qu'ils deviennent vraiment effectifs. Ceci signifie que le patient et son mentor, doivent rester sur leurs gardes en cas de dépression afin qu'un traitement, s'il est conseillé par un médecin, puisse commencer le plus tôt possible. Le second inconvénient est que l'anxiété peut s'aggraver temporairement au début du traitement que ce soit avec des tricycliques ou des SSRIs. Cela peut représenter un risque particulier durant le sevrage d'une benzodiazépine là où le niveau d'anxiété est habituellement élevé. Pour éviter une aggravation en ce qui concerne l'anxiété, il est important de démarrer avec la plus petite dose possible d'antidépresseur et de l'augmenter doucement sur une période de deux à trois semaines. Ne vous laissez pas persuader par votre médecin de commencer immédiatement par la dose thérapeutique du traitement de la dépression. Il existe aussi des craintes que les antidépresseurs comme le Prozac puissent chez certains patients déclencher, au début du traitement, un état agité, violent ou suicidaire; un faible dosage et une surveillance étroite peuvent éviter ce risque.
Il est habituellement possible de continuer la diminution lente et progressive d'une benzodiazépine alors que l'on commence un traitement aux antidépresseurs, bien que certains préfèrent cesser leur sevrage pendant 2 à 3 semaines jusqu'à ce que l'antidépresseur soit totalement effectif. Il faut s'assurer d'éviter d'augmenter la dose de benzodiazépine. Non seulement les antidépresseurs calment la dépression mais ils ont, au bout de 2 à 3 semaines, des effets anti-anxiolytiques. Ils sont en fait un meilleur traitement à long terme pour l'anxiété, les crises d'anxiété et les phobies. Ils peuvent de plus aider activement dans le processus de sevrage d'une benzodiazépine.
Une fois l'absorption d'un antidépresseur commencée pour traiter une dépression, le traitement devrait se poursuivre pendant plusieurs mois (6 mois habituellement) afin d'éviter une récurrence de celle-ci. La diminution progressive de la benzodiazépine peut continuer durant ce temps et les antidépresseurs agiront parfois comme une protection bienvenue lors des dernières étapes du sevrage. Il est important de finir le sevrage de la benzodiazépine avant de débuter celui de l'antidépresseur. Très souvent, les personnes qui absorbent des benzodiazépines à long terme prennent simultanément des antidépresseurs. Dans ce cas, elles devraient continuer ceux-ci jusqu'à ce que le sevrage des benzodiazépines soit complété.
Un autre inconvénient des antidépresseurs est qu'ils causent eux aussi, des réactions de sevrage s'ils sont interrompus subitement, un fait qui n'est pas toujours considéré par les médecins. Les symptômes de sevrage comprennent une anxiété grandissante, des troubles du sommeil, des symptômes semblables à ceux de la grippe, des symptômes gastro-intestinaux, de l'irritabilité et des crises de larmes, en fait peu différent des symptômes du sevrage de benzodiazépine. Ces réactions peuvent être empêchées par une diminution lente et progressive du dosage d'antidépresseur pendant une période variant de 1 à 3 mois (Voir le Tableau 2). La majorité des personnes qui ont été sevrées des benzodiazépines seront des expertes en matière de diminution progressive des dosages quand le moment viendra d'arrêter l'antidépresseur et seront capables de trouver une rythme de sevrage qui leur conviendra.
Mis à part leurs effets thérapeutiques au cours de la dépression et de l'anxiété, certains antidépresseurs ont un effet sédatif pour certains patients souffrant d'insomnie qui s'est avéré salutaire. Des doses faibles (10 à 50 mg) d'amitriptyline (Elavil) ou de doxépine (Sinéquan) sont remarquablement effectives pour glisser dans le sommeil si absorbé au moment du coucher. Ceux-ci peuvent être absorbés pendant de courtes périodes d'une semaine et peuvent être arrêtés en réduisant prudemment le dosage ou en prenant le médicament à toutes les deux nuits. Le sevrage n'est pas un problème lorsque de petites doses sont absorbées durant de courtes périodes ou par intermittence.
TABLEAU 2. LES SYMPTÔMES DE SEVRAGE DES ANTIDÉPRESSEURS
SYMPTÔMES PHYSIQUES
Gastro-intestinal: douleurs abdominales, diarrhée, nausée, vomissements
Symptômes de la grippe: fatigue, maux de tête, douleurs musculaires, faiblesses, sueurs et frissons
Problèmes de sommeil: insomnie, rêves très réels, cauchemars
Problèmes sensoriels: tête qui tourne, difficulté à se concentrer, vertige, picotements
et sensations de choc électrique
Troubles de motricité: tremblements, perte d'équilibre, rigidité des muscles et mouvements non contrôlésSYMPTÔMES PSYCHOLOGIQUES
Anxiété, énervement
Période de larmes
Irritabilité
Hyperactivité
Agressivité
Dépersonnalisation
Problèmes de mémoire
Confusion
Morale à la baisse (déprimé)Les bêtabloquants. Dans un petit peu de cas, de sévères palpitations, des tremblements musculaires ou des sursauts se développent durant le sevrage d'une benzodiazépine lesquels entravent le progrès du sevrage. Ces symptômes peuvent être contrôlés ou améliorés grâce à des médicaments que l'on nomme les bêtabloquants comme le propranolol (Indéral). Les drogues de ce type peuvent inhiber les effets du surplus d'épinéphrine et de norépinéphrine libéré par un système nerveux qui réagit trop. Ils ralentissent le rythme cardiaque et empêchent toute activité musculaire excessive. Bien qu'ils n'aient qu'un petit effet sur les symptômes psychologiques, ils peuvent briser le cercle vicieux dans lequel les palpitations ou les tremblements créent une anxiété qui entraîne elle-même encore plus de palpitations. Il y a des personnes qui lors du sevrage d'une benzodiazépine ne prennent que de petites doses de ce médicament (10 à 20 mg d'Indéral, trois fois par jour) régulièrement, tandis que d'autres les gardent au cas où les symptômes physiques d'une crise d'anxiété sembleraient incontrôlables. Ils ne sont pas une panacée mais parfois ils aident des personnes à surmonter une situation difficile. On utilise les bêtabloquants en plus fortes doses dans les cas de tension artérielle élevée et d'angine de poitrine, mais de telles doses ne sont pas conseillées lors du sevrage d'une benzodiazépine. Ils ne doivent pas être absorbés par une personne atteinte d'asthme car ils peuvent causer la constriction des bronches. Si on a utilisé des bêtabloquants pendant un certain temps, on devrait les arrêter progressivement en diminuant la dose, vu qu'eux aussi peuvent provoquer une réaction de sevrage qui se traduit par un rythme cardiaque élevé et des palpitations.
Les hypnotiques et les sédatifs. La plupart des hypnotiques et des sédatifs agissent de façon similaire aux benzodiazépines, y compris les barbituriques, les dérivés chloreux (Noctec) l'ethchlorvynol (Placidyl), le zopiclone (Zimovane, Imovane), le zolpidem (Ambien), le zaleplon (Sonata) et, incidemment, l'alcool. Aucune de ces drogues ne devrait être utilisée comme somnifère alternatif ou comme potion pour le sommeil durant le sevrage d'une benzodiazépine. Elles peuvent toutes causer une sorte de dépendance similaire et de plus, certaines sont plus toxiques que les benzodiazépines.
Si dormir devient un vrai problème, une petite dose d'antidépresseurs tricycliques ayant des effets sédatifs (voir les antidépresseurs ci-dessus) est une solution à envisager. Alternativement, une antihistamine ayant des effets sédatifs (ex: la diphénylhydramine [Bénadryl], la prométhazine [Phénergan] peut être absorbée temporairement. Ni les antidépresseurs, ni les antihistamines réagissent de la même manière que les benzodiazépines.
Quelques drogues relatives aux tranquillisants majeurs présentent des effets sédatifs et sont aussi utilisées pour combattre la nausée, le vertige et le mal du transport. Elles sont parfois prescrites durant le sevrage, en particulier la prochlorméthazine (Compazine), Cependant de telles drogues peuvent avoir des effets secondaires sérieux (des troubles moteurs comme ceux de la maladie de Parkinson) et ne sont pas recommandées pour un usage à long terme ou comme remplaçant des benzodiazépines.
Les autres médicaments. On a testé plusieurs drogues lors des études du sevrage d'une benzodiazépine afin de voir si elles pouvaient accélérer le processus, prévenir ou diminuer les symptômes ou encore améliorer le pourcentage de succès à long terme. Beaucoup de ces études portaient sur ce que l'on appelle ici un sevrage ultra-rapide. Par exemple, une étude récente faite aux États-Unis sur le sevrage d'une benzodiazépine de consommateurs à long terme, Rickels, Schweizer et al. Psychopharmacology 141,1-5,1999, a analysé les effets de l'antidépresseur sédatif (Trazodone, Désyrel) et de l'anticonvulsif (valproate de sodium, Dépakote). Ni l'un, ni l'autre de ces médicaments a eu un effet sur la sévérité des symptômes de sevrage, mais le taux de diminution progressive était de 25% de la dose hebdomadaire de benzodiazépine - un sevrage plutôt rapide ! On a découvert d'autres drogues de faible valeur, voire même nulle, lors des essais de sevrage allant de 4 à 6 semaines. Celles-ci incluent le buspirone (BuSpar, une drogue qui combat l'anxiété), la carbamazépine (Tégrétol, un anticonvulsif), la clonidine (Catapres contre l'anxiété et parfois utilisée lors d'une désintoxication à l'alcool), la nifédipine (Adalat) et l'alpidem.
Certains rapports indiquent que le médicament gabetin (Neurotonin) tiagabine (Gabitril) et peut- être aussi pregabalin (en attente de licence) aiderait les problèmes d'insomnie et d'anxiété durant la période de sevrage. Donc aucune de ces drogues ne peut être recommandée. Avec une diminution très progressive selon le rythme de l'individu, comme indiqué au Chapitre II, les drogues supplémentaires ne sont pas nécessaires puisque des symptômes importants apparaissent rarement. Seulement lors de situations spéciales, comme décrites ci-dessus, il peut y avoir une place pour un antidépresseur, un bêtabloquant ou une antihistamine sédative. Il n'est pas nécessaire d'éviter médicaments contre la douleur comme le Tylénol, Feldène etc... en présence de maux de tête et de douleurs ordinaires.
L'USAGE D'UNE BENZODIAZÉPINE PENDANT ET APRÈS LE SEVRAGE
Qu'arrive-t-il si une personne en cours de sevrage d'une benzodiazépine ou qui vient d'achever avec succès son sevrage a besoin d'une opération chirurgicale ? Les benzodiazépines sont utiles comme prémédication avant toutes opérations majeures pour leurs fonctions amnésiques et sédatives lors des procédures chirurgicales mineures. Malgré cela, beaucoup d'ex-consommateurs sont terrifiés à l'idée que si on leur administre une benzodiazépine pour ces raisons, ils ont peur d'en devenir à nouveau dépendant. Ils doivent se rassurer une dose unique de benzodiazépine administrée en vue d'une opération ne peut en aucun cas faire ressurgir la dépendance et les symptômes de sevrage ne réapparaîtront pas. Les symptômes notés dans ces circonstances sont plutôt le résultat d'une peur et non d'une réaction de la benzodiazépine. Beaucoup de patients que j'ai observés personnellement ont reçu des doses répétées de midazolam (Versed, Hypnovel, Dormicum), une benzodiazépine de courte action, pour des procédures dentaires (la phobie du dentiste est commune lors d'un sevrage) ainsi que d'autres benzodiazépines y compris le diazépam pour des opérations mineures et majeures, et ils s'en sont remis sans complications.
Bien des personnes qui ont repris l'usage des benzodiazépines parce qu'ils avaient échoué au premier sevrage peuvent très bien avoir autant de succès que les ceux qui débutent au sevrage progressif.
DIÈTE, BREUVAGE ET EXERCICE
Il y a un intérêt de plus en plus marqué afin de savoir si une diète spéciale doit être suivie lors du sevrage des benzodiazépines, particulièrement en Amérique du Nord. Quelle nourriture ou breuvage prendre ou exclure ? Quels suppléments alimentaires à ajouter ? Ce sont les questions les plus fréquemment posées. Selon moi, il n'y a aucun besoin spécifique à ce sujet. Il y a des gens qui disent que la caféine et l'alcool ne devraient pas être pris durant cette période. Cependant, le but est d'amener les gens à diminuer graduellement leur dose de benzodiazépines à la maison pour qu'ils puissent s'habituer à vivre normalement sans aucune drogue et sans avoir à changer leur manière de vivre. D'après moi, une tasse de café ou de thé en modération (deux tasses par jour à peu près) ou une quantité raisonnable de chocolat ou soda est tout à fait acceptable durant le sevrage des benzodiazépines. À l'exception de quelques individus qui sont particulièrement vulnérables à la caféine ou ceux qui ont un niveau très élevé d'anxiété. Il est évident que l'on ne devrait pas boire de café en soirée ou boire du café ou thé non décaféiné au milieu de la nuit en période d'insomnie. Je crois qu'interdire le café au déjeuner est en général trop sévère et inutile. On essaie de redevenir normal en société et sociable, pas difficile.
La même chose avec l'alcool, un verre ou deux de vin est tout à fait correct et même souhaitable pour certaines personnes pour une meilleure santé. Il est important de ne pas substituer une augmentation d'alcool pour compenser la diminution dans la dose de benzodiazépines prises. À part cela, je ne vois pas de raison de se priver des petits plaisirs de la vie. La modération est la clef en tout.
Le même principe s'applique à la nourriture. L'humanité s'est bien adaptée à toutes les phases de son évolution pour obtenir toutes les substances nutritives nécessaires malgré les différentes manières de s'alimenter dans les différentes cultures. Une diète bien équilibrée incluant des portions de fruits et de légumes et une source de protéines et de gras provenant de la viande ou de légumes, presque ou aucun sucre ou "junk food" fournit toutes les substances nutritives dont une personne a besoin. Il n'y a aucun besoin pour des suppléments alimentaires, vitamines, minéraux ou des mesures de désintoxication. Cela pourrait même être dangereux si exagéré. Il est parfois recommandé de couper les farines blanches, le sucre blanc, etc. pour certaines personnes mais une diète trop sévère peut amener des effets négatifs. D'autres gens ont déclaré se sentir beaucoup mieux après un changement de diète - c'est à se demander ce qu'ils mangeaient auparavant !
Certains individus deviennent intolérants ou très sensibles à certaine nourriture sans que ce soit une allergie déclarée. Dans ce cas, le gros bon sens veut que l'on évite cette nourriture pour un temps. En cas de doute, obtenez l'avis d'une nutritionniste avertie mais en général une bonne nutrition est suffisante. Avant que les nouvelles diètes soient à la mode, des milliers de gens ont réussi à cesser l'utilisation des benzodiazépines dans différents pays ayant une diète très différente sans aucune restriction. Cela est toujours vrai encore aujourd'hui.
Une diète normale comprend toujours une bonne quantité de liquide à boire. Les besoins d'eau et de sel peuvent varier avec la stature et poids, le climat et la quantité d'exercice pratiquée, etc. donc on ne peut la définir pour chaque individu. Cependant, il n'est pas nécessaire de boire plus en période de sevrage pour se nettoyer des toxines. Notre organisme réussit très bien à se nettoyer tout seul même avec un minimum de liquide absorbé et le surplus d'eau est éliminé inutilement.
L'exercice physique régulier et modéré est recommandé pendant le sevrage car il aide à garder la forme, élève le degré d'endurance et la circulation sanguine au cerveau, aux muscles et au niveau de l'épiderme en plus d'aider à la stabilité émotive. Il n'y a aucune raison de pratiquer un sport que vous détestez car nous voulons vivre une vie plus équilibrée ce qui par définition inclus de faire ce que nous apprécions.
Fumer. Je me dois de mentionner le fait de fumer la cigarette même en considérant l'attitude devant cette très mauvaise dépendance, mais pour ceux de nous qui sommes fumeurs c'est probablement trop demander d'arrêter de fumer et de cesser en même temps les benzodiazépines. Plusieurs personnes ont mentionné qu'il est plus facile de cesser de fumer lorsque qu'elles n'utilisent plus de benzodiazépines car le besoin de drogue peut diminuer. En général, s'en faire au sujet de nos mauvaises habitudes, diète incluse, s'additionne inutilement aux stress du sevrage. Il est mieux de prendre cela tranquillement, une chose à la fois.
LE COURS DU SEVRAGE
Durant le sevrage d'une benzodiazépine, les symptômes croissent et diminuent d'une manière caractéristique, variant au quotidien selon la sévérité et le type, semaine après semaine et même au cours d'une même journée. Des symptômes vont et viennent. D'autres peuvent les remplacer. Il n'y a aucune raison de se laisser décourager par ces vagues de récurrences. Avec le temps, les vagues de symptômes deviennent moins fortes et moins fréquentes. Typiquement "la fenêtre" de la normalité, quand vous vous sentez bien pendant quelques heures ou quelques jours, apparaît au bout de quelques semaines; graduellement "la fenêtre" devient plus fréquente et dure plus longtemps, tous les malaises s'estompent.
Il est impossible d'établir une durée exacte des symptômes du sevrage. Cela dépend à quel moment vous commencez, de combien d'appui vous avez besoin et recevez, comment vous contrôlez votre diminution progressive de dosage ainsi que beaucoup d'autres facteurs. Avec une diminution lente, des consommateurs à long terme ont virtuellement éliminé tous leurs symptômes au moment d'absorber leur dernier comprimé et les symptômes disparaissent au bout de quelques mois pour la majorité d'entre eux. Être vulnérable à un stress supplémentaire peut selon le cas durer plus longtemps et un cas de stress sévère peut temporairement faire ressurgir des symptômes. Peu importe la nature de vos symptômes, il est mieux de ne pas s'y attarder. Après tout, des symptômes ne sont que des symptômes et durant le sevrage la plupart d'entre eux ne sont pas le signe d'un malaise mais au contraire celui d'une guérison. En plus, tandis que votre esprit s'éclaircit, vous pouvez vous exercer à faire face à eux de différentes façons afin qu'ils deviennent de plus en plus légers.
Ce qui est rassurant c'est qu'on a trouvé, lors d'études cliniques, que le succès éventuel d'un sevrage ne dépend pas de la durée de l'utilisation, du dosage ou de la sorte de benzodiazépine, de la vitesse du sevrage, de la sévérité des symptômes, du diagnostique psychiatrique ou des essais de sevrages antérieurs. Par conséquent, à partir de n'importe quel point, un consommateur à long terme motivé peut y arriver s'il entreprend le traitement de bon cœur.
LES SYMPTÔMES PROLONGÉS DU SEVRAGE
Une minorité de personnes sevrée des benzodiazépines semblent souffrir d'effets à long terme, appelés symptômes prolongés qui ne disparaissent pas au bout de quelques mois, voire même quelques années. On estime que peut-être entre 10 et 15 pour cent de consommateurs à long terme d'une benzodiazépine développent "un syndrome post-sevrage". Plusieurs d'entre eux ont absorbé des benzodiazépines pendant 20 ans ou plus et quelques-uns ont connu des mauvaises expériences de sevrage. L'incidence de symptômes prolongés chez ceux qui ont suivi une diminution progressive sous leur propre contrôle est certainement beaucoup plus basse.
Le Tableau 3 indique les symptômes qui peuvent durer. Ils comprennent l'anxiété, l'insomnie, la dépression, les symptômes variés sensoriels et les symptômes moteurs, les dérangements gastro-intestinaux ainsi qu'une mémoire et une cognition défaillantes. Les raisons pour lesquelles ces symptômes persistent chez certaines personnes ne sont pas encore claires. Il est fort probable que beaucoup de facteurs y soient impliqués, certains liés directement à la drogue et d'autres indirectement ou encore ne sont que des effets secondaires (Voir le Tableau 4).
TABLEAU 3. LES SYMPTÔMES PROLONGÉS DU SEVRAGE D'UNE BENZODIAZÉPINE
Symptômes Cours habituel Anxiété - Diminue progressivement au bout d'un an. Dépression - Peut durer quelques mois et réagit bien aux antidépresseurs. Insomnie - Diminue progressivement sur une période allant de 6 à 12 mois. Symptômes sensoriels: Acouphène, picotement, engourdissement, douleur profonde ou sensation de brûlure dans les membres, sensation de tremblement ou de vibration intérieure, sensations cutanées bizarres. - Diminuent progressivement mais peuvent durer au moins un an, voire parfois plusieurs années. Symptômes moteurs: douleur musculaire, faiblesse, crampes douloureuses, convulsions, sursauts, spasmes, crises de tremblement - Diminuent progressivement mais peuvent durer au moins un an, voire parfois plusieurs années. Mémorisation et cognition faibles - Diminuent progressivement mais peuvent durer au moins un an, voire parfois plusieurs années. Symptômes gastro-intestinaux - Diminuent progressivement mais peuvent durer au moins un an, voire parfois plusieurs années.
TABLEAU 4. LES CAUSES PROBABLES DES SYMPTÔMES PROLONGÉS DU SEVRAGE D'UNE BENZODIAZÉPINE
Causes possibles Effets 1. Le manque de stratégies de gestion du stress bloqués durant l'usage des benzodiazépines apparaît lors du sevrage. Anxiété, vulnérabilité au stress 2. Altération de la mémoire causé par les benzodiazépines qui empêchent la résolution des conflits normaux lesquels ressurgissent en période de sevrage. Anxiété, dépression 3. Expériences traumatisantes vécues lors d'un sevrage précédent Troubles du stress post-traumatiques 4. (?) Changements biochimiques causés par les benzodiazépines (sérotonine, norépinéphrine [noradrénaline], hormones de stress) Dépression 5. Hyperexcitabilité du système nerveux due aux changements constants qui se produisent dans les récepteurs de GABA/benzodiazépine. Symptômes sensoriels et moteurs, anxiété, insomnie. 6. (?) Dommage structurel ou fonctionnel au niveau des tissus du cerveau Trouble de mémoire, perception 7. (?) Dommages au niveau du système intestinal et immunitaire Symptômes gastro-intestinaux 8. (?) Rétention prolongée des benzodiazépines dans les tissus de l'organisme Hyperexcitabilité prolongée du système nerveux (?) Indique des causes possibles pour lesquelles actuellement, il n'existe aucune preuve scientifique
L'anxiété. L'anxiété qui persiste après une phase aiguë du sevrage peut être due en partie à un défaut d'apprentissage causé par les benzodiazépines. Les benzodiazépines diminuent l'apprentissage de nouvelles habilités y compris celles qui concernent les stratégies de gestion du stress. De telles habilités évoluent normalement sans cesse depuis l'enfance jusqu'à l'âge mûr ou plus tard, au fur et à mesure que les expériences de la vie s'accumulent. Leur développement peut être bloqué pendant une période allant jusqu'à plusieurs années durant lesquelles on a utilisé des benzodiazépines. Après le sevrage, l'ex-consommateur est laissé dans un état vulnérable avec une habileté diminuée à faire face aux situations difficiles. Une guérison complète peut demander plusieurs mois d'apprentissage de nouvelles stratégies de gestion du stress pour compenser le manque durant les années ou elles furent altérées par les benzodiazépines.
Deuxièmement, le sevrage d'une benzodiazépine peut faire surgir des problèmes graves qui jusque-là n'avaient jamais été pleinement résolus. Par exemple, les troubles de la mémoire causées par les benzodiazépines peuvent empêcher la résolution normale d'un stress personnel vécu lors d'un décès ou d'un accident. De telles expériences partiellement oubliées ou éloignées peuvent ressurgir après le sevrage et faire prolonger à la fois l'anxiété et la dépression. Il n'est pas rare pour un veuf ou une veuve de s'être vu prescrire des benzodiazépines au moment du décès du conjoint, d'avoir à vivre pour la première fois, le processus du deuil après le sevrage, même si l'enterrement a eu lieu des années auparavant.
Un troisième facteur peut apparaître chez des individus qui ont connu des expériences effrayantes durant le sevrage. Ce n'est pas rare pour ceux qui ont connu un sevrage rapide sans aucune explication adéquate, souvent en milieu hospitalier ou dans des centres de désintoxication, mais aussi parfois chez eux quand leur médecin a cessé toutes prescriptions. De telles personnes peuvent développer des malaises dus au syndrome du stress post-traumatique (SSPT) au cours desquels leurs expériences sont constamment revécues comme des retours en arrière ou des cauchemars et, par conséquent, prolongent l'anxiété.
De plus, beaucoup de consommateurs à long terme de benzodiazépines, bien qu'ils n'y soient absolument pour rien, sont des personnes fortement tendues, ayant très peu d'estime de soi et dont les problèmes d'anxiété les ont amenées à se faire prescrire tout d'abord des benzodiazépines et par la suite à cause de leur anxiété continuelle, a amené le médecin à leur en prescrire continuellement. Cela peut prendre plus de temps pour ces personnes à retrouver ou à atteindre une entière confiance en elles.
Malgré ces facteurs, les symptômes prolongés d'anxiété, y compris l'agoraphobie et les crises d'anxiété, ont tendance à diminuer progressivement et ne durent rarement pas plus d'une année. Le processus peut être amélioré grâce à un bon appui psychologique et par les mesures décrites sous le paragraphe traitant des symptômes aigus d'anxiété. Croyez-le ou non, certaines personnes ont plus de confiance en elle après un sevrage qu'elles ne l'étaient avant l'utilisation des benzodiazépines.
Dépression. La dépression peut être causée ou aggravée par l'absorption chronique d'une benzodiazépine mais elle est aussi une caractéristique du syndrome de sevrage. Les symptômes dépressifs peuvent apparaître pour la première fois après un sevrage, parfois au bout d'un délai de quelques semaines et ils peuvent être sévères et prolongés durant des mois. On ne sait pas encore si les personnes qui ont fait une dépression antérieurement ou quand les dépressions sont courantes dans leur famille sont plus sujettes à cette complication et les causes de la dépression sont encore inconnues. Comme nous l'avons discuté dans les Chapitres I et II, les benzodiazépines dérangent la fonction de nombreux neurotransmetteurs et hormones et la dépression peut en être le résultat, comme par exemple, celui d'une activité faible de la sérotonine combinée au stress du sevrage. Si elle s'avère assez sévère pour nécessiter un traitement, la dépression durant le sevrage réagit aux antidépresseurs avec ou sans thérapie cognitive et diminue habituellement régulièrement sur une période allant de 6 à 12 mois.
Insomnie. Le manque de sommeil accompagne communément l'anxiété et la dépression. Dans l'anxiété, il y a typiquement une difficulté à s'endormir tandis que dans la dépression les réveils matinaux tout comme ceux de la nuit s'avèrent fréquents. L'insomnie est aussi commune au symptôme aigu de sevrage et est accompagnée de cauchemars et de d'autres troubles du sommeil. De temps en temps, l'insomnie accompagnée ou non du syndrome des jambes agitées ou avec sursauts musculaires ou les deux persiste comme un symptôme isolé et peut durer plusieurs mois, alors que les autres ont disparu. Cependant, il faut rassurer les insomniaques qu'un sommeil régulier et suffisant revient pour tous. Il existe des mécanismes naturels puissants dans notre corps qui s'assurent que le cerveau ne deviendra pas gravement privé de sommeil.
Troubles sensoriels et moteurs. Il ne fait aucun doute qu'après le sevrage d'une benzodiazépine, le système nerveux est extrêmement sensible à tous stimuli sensoriels et moteurs. Habituellement, tout se calme en quelques semaines mais des sensations étranges peuvent persister occasionnellement.
L'un des symptômes sensoriel le plus perturbant est l'acouphène, soit un son de cloche ou un sifflement constant dans les oreilles lequel a été remarqué lors de plusieurs études sur le sevrage d'une benzodiazépine. Une femme a décrit son acouphène comme étant "une aiguille du son" strident, perçant profondément sa tête. L'acouphène est souvent accompagné d'un degré de perte de l'ouïe et il n'est pas rare de rencontrer des personnes souffrant d'une surdité partielle nerveuse, n'ayant jamais absorbé de benzodiazépines. Néanmoins, l'acouphène fait souvent sa première apparition lors du sevrage d'une benzodiazépine chez des individus qui ont subi une perte de l'ouïe depuis des années. Elle peut être unilatérale ou localisée de façon précise, même pour ceux qui présentent une surdité bilatérale symétrique. Il se peut que les personnes qui ont absorbé une benzodiazépine à long terme soient particulièrement sujettes à l'acouphène et, si c'est vrai, cela reste à prouver. Cet acouphène peut durer plusieurs années et ne réagit pas nécessairement aux traitements habituels réservés à l'acouphène (masques etc.); il n'est pas plus soulager par la reprise d'une benzodiazépine. Cependant, tous les gens qui ont un problème persistant après un sevrage devraient consulter un spécialiste des oreilles et auront peut-être la chance de trouver une clinique spécialisée pour ce symptôme.
Un nombre de sensations corporelles déplaisantes peut persister après un sevrage comme le picotement, l'engourdissement ou des endroits endoloris sur le torse, le visage, les membres et les doigts. Elles peuvent être accompagnées par des sensations de brûlure ou par des douleurs aux muscles ou aux os qui semblent profondes. D'autres personnes se plaignent d'un "tremblement interne" ou d'une sorte de vibration alors que d'autres décrivent des sensations bizarres comme si de l'eau ou un liquide visqueux coulait le long de leur corps ou encore les contorsions d'un reptile sur leur crâne. Les symptômes moteurs qui peuvent persister comprennent la tension musculaire, la faiblesse, les crampes, les sursauts, les spasmes et les crises de tremblements.
Mécanismes éventuels des symptômes sensoriels persistants et moteurs. Bien que les symptômes décrits ci-dessus soient souvent aggravés par le stress, ils ne sont en aucun cas simplement dus à l'anxiété. Ils semblent indiquer un mauvais fonctionnement du parcours moteur et sensoriel au niveau de la moelle épinière ou de la moelle épinière et du cerveau. Un indice possible de leur mécanisme fut trouvée lors d'une expérience avec un flumazénil (Anexate, Romazicon) qui est un récepteur de benzodiazépine antagonique, publié par Lader et Morton (Journal de la Psychopharmacologie 1992, 6 357-63). Cette drogue, lorsqu'elle est injectée par voie intraveineuse, a apporté un soulagement rapide des symptômes prolongés post-sevrage (tension musculaire, engourdissement, faiblesse, crampes ou sursauts musculaires, brûlure, tremblements) qui étaient présents, chez 11 patients, sur une période de 5 à 42 mois. Les symptômes se sont améliorés de 27 à 82% et le plus fort résultat s'est vu chez les patients qui avaient le plus bas niveau d'anxiété. Il n'y a eu aucune réaction suite aux infusions de solution saline.
On pense que le flumazénil agit en améliorant les récepteurs GABA/benzodiazépines (voir au Chapitre I) de manière à ce qu'ils deviennent plus réceptifs aux actions inhibitrices des GABA. Les résultats indiquent que les symptômes prolongés sont causés par l'échec des récepteurs à revenir à leur état normal après être devenus insensibles au GABA, dû au développement de la tolérance (voir Chapitre I). La réaction au flumazénil démontre aussi que les benzodiazépines peuvent causer des effets pharmacologiques qui durent plus longtemps que ce que l'on croyait auparavant.
Malheureusement, le flumazénil ne présente pas actuellement une cure pratique pour les symptômes prolongés. La drogue doit être administrée par voie intraveineuse et son temps d'action est si court que l'apaisement des symptômes est seulement temporaire. La drogue ne peut pas être absorbée par une personne qui utilise des benzodiazépines car elle précipite une réaction aiguë de sevrage. Cependant, bien que ces symptômes sensoriels et moteurs prolongés puissent parfois sembler devenir permanents, en fait, leur sévérité décroît au fil des années, même sans l'aide du flumazénil et ainsi ne signifient donc pas la présence d'une maladie neurologique majeure. De tels symptômes peuvent être apaisés partiellement grâce à des techniques de relaxation, quelques systèmes moteurs et sensoriels peuvent être aidés par la carbamazépine (Tégrétol) et d'autres symptômes moteurs peuvent être aidés par le propranolol (Indéral).
Mémoire et connaissance défaillantes. Bien que l'on sache que les benzodiazépines affaiblissent la mémoire ainsi que certaines fonctions cognitives, en particulier la capacité de pouvoir retenir l'attention, des consommateurs à long terme se plaignent d'une perte continuelle et ce, de façon persistante, des habilités intellectuelles après un sevrage. Plusieurs études à ce sujet ont démontré que l'amélioration est très lente. Les plus longues études thérapeutiques s'étendent seulement sur une période de 6 mois après le sevrage. Une détérioration cognitive, bien qu'elle se soit améliorée lentement, a persisté au moins pendant cette durée et n'était pas du tout reliée à des niveaux d'anxiété (Tata et al. Psychological Medicine 1994, 24, 203-213). Des études sur des individus suédois indiquèrent une détérioration intellectuelle entre 4 et 6 mois après le sevrage d'une benzodiazépine, mais on n'a pu clairement en conclure que l'usage de l'alcool en était un facteur supplémentaire.
Les benzodiazépines endommagent-elles la structure du cerveau ? Ces résultats ont amené cette question au sujet d'éventuel dommage que peuvent causer les benzodiazépines sur la structure du cerveau. Comme l'alcool, les benzodiazépines sont des graisses solubles et sont assimilées par les membranes graisseuses (les lipides) des cellules du cerveau. On a mentionné, que leur utilisation s'étalant sur une période de plusieurs années pouvait causer des changements physiques tels qu'un rétrécissement du cortex cérébral, comme cela a été prouvé chez des alcooliques chroniques, et, que de telles transformations peuvent être seulement partiellement réversibles après un sevrage. Cependant, malgré plusieurs études faites sur les scanographes tomographiques (CT), on a conclu qu'aucun signe d'atrophie encéphalique n'avaient été décelé de manière concluante chez les consommateurs à dose thérapeutique et, même chez ceux qui en absorbaient une forte dose, les résultats n'ont guère été concluants. Il est possible que les benzodiazépines puissent causer des changements subtils lesquels ne peuvent pas être détectés par les méthodes actuelles, mais d'après les données disponibles, il n'y a aucune raison de penser que de tels changements soient permanents.
Les symptômes gastro-intestinaux. Les symptômes gastro-intestinaux peuvent se prolonger après un sevrage, habituellement chez les individus qui avaient, dans le passé, des troubles digestifs. De telles personnes peuvent apparemment développer une intolérance à certains aliments, bien que des tests d'allergie sérieux à ces aliments (ex: les anticorps contre les composants d'un aliment spécifique) sont pour la plupart du temps toujours négatifs. Néanmoins, beaucoup de malades pensent qu'ils ont un trouble du système immunitaire ou bien qu'ils ont le candida. À présent, il n'existe aucune évidence scientifique claire sur ces sujets, bien que, comme nous l'ayons mentionné auparavant, les récepteurs des benzodiazépines sont présents dans les intestins et que l'usage ou le sevrage d'une benzodiazépine peut affecter les réactions immunitaires. Il existe des preuves qu'une hyperventilation chronique provoque une libération d'histamine (une substance libérée lors des réactions allergiques) et que l'incidence à l'intolérance ainsi que les réactions "pseudo-allergiques" seraient chroniquement élevées chez les hyperventilés. Des conseils diététiques, respiratoires ainsi que dans le cas d'infections de type candida sont donnés dans les livres écrits par Shirley Trickett dont les références sont indiquées à la fin de ce chapitre. Il est en général contre-indiqué de se maintenir à un régime d'exclusion stricte; en suivant un régime équilibré et normal et en prenant des mesures saines d'hygiène de vie comprenant une activité physique régulière, les symptômes gastro-intestinaux dus au sevrage, devraient diminuer progressivement.
Vivre avec des symptômes de sevrage prolongés. Plusieurs personnes ont mentionné leur peur que certains symptômes puissent être permanents, dont elles ne guériraient pas complètement, surtout des symptômes associés au fonctionnement cognitif comme la mémoire et le raisonnement en plus des autres problèmes comme la douleur musculaire et les problèmes gastro-intestinaux.
Vous pouvez être réassuré. Tout tend à prouver que les symptômes diminuent régulièrement presque toujours après le sevrage même si parfois une période assez longue peut être nécessaire, voire plusieurs années dans certains cas. La majorité des gens voient une diminution marquée avec le temps, habituellement loin des symptômes endurés au début du sevrage et qui vont presque tous disparaître. Toutes les études démontrent une grande amélioration dans les fonctions cognitives et tous les symptômes physiques. Même si les études n'ont pas dépassé une année, les résultats suggèrent une amélioration continue. Il n'y a absolument aucune évidence qui démontre que les benzodiazépines peuvent causer des dommages permanents au cerveau, au système nerveux ou à tout notre organisme.
Les gens qui doivent endurer des symptômes prolongés peuvent s'aider en prenant soin d'eux. Par exemple, ils peuvent:
Faire de l'exercice physique: L'exercice physique améliore la circulation sanguine par tout l'organisme, incluant le cerveau. Il faut trouver ce que l'on aime, commencer doucement et augmenter au fur et à mesure que l'on s'améliore. De plus, il faut s'exercer régulièrement car l'amélioration de tout notre organisme aide à combattre la dépression, à diminuer la fatigue et à obtenir une meilleure forme physique.
Activer leur cerveau: Il faut utiliser son cerveau en appliquant des méthodes qui améliorent l'efficacité de celui-ci: faire des listes, faire des mots croisés, et surtout trouver ce qui nous dérange le plus car nous pouvons toujours améliorer une situation dérangeante temporairement. Cette manière de fonctionner permet de compenser pour les manques cognitifs temporaires.
Augmenter son intérêt: Chercher à apprendre quelque chose de nouveau qui oblige le cerveau à travailler en augmentant la motivation et l'intérêt pour autre chose tout en vous distrayant de vos symptômes.
Se calmer: Il faut surtout éviter de s'en faire. S'inquiéter, avoir peur et être nerveux augmente les symptômes de sevrage. Plusieurs de ces symptômes sont dus à l'anxiété seulement et non à des problèmes au cerveau ou du système nerveux. Les gens qui ont peur du sevrage ont parfois une plus grande intensité de symptômes que ceux pour qui le sevrage se vit au fur et à mesure des jours sans s'en faire et qui ont confiance dans leur guérison.
Les benzodiazépines et leur temps résiduel dans l'organisme après un sevrage. Les individus présentant des symptômes prolongés posent souvent cette question. Est-il possible qu'une des causes des symptômes prolongés soit le fait que les benzodiazépines restent dans le système après plusieurs mois, cachées peut-être dans des tissus tels que ceux du cerveau et des os ? Une élimination lente provenant de ces sites maintiendrait-elle la continuation des symptômes de sevrage ?
Comme c'est le cas pour beaucoup d'autres inconnues concernant les benzodiazépines, les réponses à ces questions sont encore incertaines. Les concentrations sanguines de benzodiazépine ont été mesurées et ont indiquées qu'elles atteignaient des niveaux indétectables 3 ou 4 semaines après la cessation de leur utilisation chez des individus sevrés pour des doses cliniques. Il est difficile d'obtenir de l'information sur les concentrations de benzodiazépines au niveau du cerveau ainsi que dans les autres tissus, en particuliers chez les humains. Nous sommes certains que les benzodiazépines pénètrent le cerveau et aussi qu'elles se dissolvent dans tous les tissus graisseux (contenant des lipides) y compris les dépôts dans tout notre corps. Il est possible qu'elles se cachent dans de tels tissus pendant une certaine période de temps et qu'elles soient devenues indétectables au niveau sanguin. Cependant, la plupart des tissus du corps sont en équilibre avec le sang, qui les alimente sans cesse et il n'existe aucun mécanisme qui indiquerait, que les benzodiazépines seraient "bloquées" dans les tissus tels que ceux du cerveau. Il n'existe aucune donnée sur combien de temps les benzodiazépines restent dans les os, lesquels ont une concentration de graisse plus faible mais aussi un cours plus lent de recouvrement cellulaire.
Néanmoins, la concentration en benzodiazépines, restant dans les tissus de l'organisme après un sevrage, doit être très faible autrement, les drogues se retrouveraient à nouveau dans le sang en quantités perceptibles. Il est difficile d'imaginer que de telles concentrations seraient suffisantes pour provoquer des effets cliniques ou encore que des effets directs puissent durer pendant des mois, voire des années. Cependant, il n'est pas concevable que même des concentrations faibles soient assez effectives pour empêcher le retour à l'état pré-benzodiazépine normal des récepteurs de GABA/benzodiazépine dans le cerveau. Si c'est le cas, les récepteurs pourraient continuer à être résistants aux actions de nature calmante des GABA (voir le Chapitre I) et l'effet serait de prolonger l'état d'hyperexcitabilité du système nerveux. Les facteurs possibles qui contribuent aux symptômes prolongés sont indiqués dans le Tableau 4.
[Cette monographie se termine sur beaucoup d'inconnues: le sevrage d'une benzodiazépine reste une histoire inachevée. Nous espérons que les expériences, de nombreux patients, décrites dans ce livre aideront à amener une sensibilisation au niveau de la profession médicale et des problèmes publics associés à l'usage prolongé d'une benzodiazépine ainsi qu'à son sevrage.]
ÉPILOGUE
Cette étude se termine sur plusieurs questions dont les réponses sont encore inconnues. Le sevrage des benzodiazépines demeure un rapport à terminer. Plusieurs aspects ont besoin d'une attention spéciale comme:
Éducation. Tous les médecins et les gens du milieu paramédical devraient acquérir une meilleure connaissance afin de prescrire les benzodiazépines sur une très courte période seulement. Ils devraient connaître aussi l'effet de dépendance associée aux benzodiazépines et les méthodes de sevrage (un sevrage en douceur sur une longue période et un support constant aux personnes concernées). Tout ce protocole devrait être enseigné aux médecins de famille, psychiatres et autres spécialistes, au personnel des unités de désintoxication, aux pharmaciens, aux psychologues et autres thérapeutes incluant aussi les infirmières et le personnel médical du milieu communautaire. Il faut augmenter la prise de conscience générale à ce sujet par des pressions du public pour accélérer l'établissement de ces mesures.
Recherche. Plus de recherches sont nécessaires sur les effets secondaires de l'utilisation prolongée des benzodiazépines. L'étude devrait porter particulièrement sur la structure du cerveau en utilisant les techniques modernes de résonances magnétiques et de la circulation sanguine au cerveau (MRI) combinée à des tests neurologiques. Plus de recherches sont nécessaires sur les glandes endocrines, sur le système gastro-intestinal, le système immunitaire et la prise de benzodiazépines.
Méthodes de traitement. De meilleures techniques pour traiter l'insomnie et l'anxiété doivent être développées. Je doute fort qu'une nouvelle drogue puisse guérir l'anxiété ou l'insomnie mais il doit être possible de développer des agents pharmacologiques moins dommageables et avec moins d'effets secondaires. Par exemple, les rats traités avec le flumazénil et une benzodiazépine ne développent pas de tolérance aux benzodiazépines tout en ayant quand même l'effet anxiolytique désiré. Une telle combinaison pourrait peut-être fonctionner chez l'humain mais n'a pas encore été testée car aucun comprimé de flumazénil que l'on peut avaler n'est disponible. De même, les égalisateurs d'humeur anticonvulsifs comme gabapentin, tiagabine et pregabalin peuvent peut-être aussi remplir ses promesses car leur mode d'efficacité est différent des benzodiazépines. En même temps, les thérapies psychologiques pour le traitement de l'anxiété et l'insomnie peuvent être améliorées et mieux enseignées à tous. Il est sûrement possible de développer de nouvelles méthodes différentes de celles prescrites dans ce document pour le sevrage des gens dépendants des benzodiazépines.
Centre pour le sevrage. Des centres spécialisés en sevrage pour ceux dépendant de l'alcool ou des drogues fortes récréatives ne répondent pas au besoin des gens dépendant des benzodiazépines qui le sont devenus par ordonnance médicale. Ces places qui détoxiquent le monde très rapidement et selon une méthode rigide sont tout à fait inadaptées dans la désintoxication des benzodiazépines. Il y a un besoin urgent de cliniques spécialisées dans le sevrage des benzodiazépines ou les patients pourraient recevoir l'aide individuelle et personnalisée (souple, compréhensive et nécessaire), en plus du support par une thérapie appropriée. Pour le moment, il y a trop peu d'endroits ou de groupes bénévoles qui supportent les gens dans leur sevrage avec des moyens financiers on ne peut plus précaires. Un financement approprié fournirait aussi la possibilité d'organiser le sevrage à la maison ou les patients en crises pourraient obtenir des périodes d'aide sporadiques dans les pires moments dans une ambiance d'entraide et familial.
Finalement, c'est encore une grande tragédie qu'au 21ème siècle des millions de personnes dans le monde doivent souffrir des effets secondaires des benzodiazépines seules. Près de 50 ans après l'apparition des benzodiazépines et de leur utilisation comme médicament dans les années 50, il y a encore sûrement un besoin pour une monographie comme celle-ci. Cependant, j'espère que l'expérience décrite dans celle-ci, acquise auprès de nombreux patients, aidera à conscientiser tous les professionnels de la santé ainsi que le publique en général aux problèmes associés à l'utilisation prolongée des benzodiazépines et du problème de sevrage.
LECTURES SUPPLÉMENTAIRES
Ashton, H. (1994) Benzodiazepine withdrawal: unfinished story. British Medical Journal 288,135-40.
- Ashton, H. (1991) Protracted withdrawal syndromes from benzodiazepines. Journal of Substance Abuse Treatment 8,19-28.
- Ashton, H. (1995) Protracted withdrawal from benzodiazepines: The post-withdrawal syndrome. Psychiatric Annals 25,174-9.
- Ashton, H. (1994) The treatment of benzodiazepine dependence. Addiction 89,1535-41.
- Trickett, S. (1998) Coming Off Tranquillisers, Sleeping Pills and Antidepressants. Thorsons, London.
- Trickett, S. (1994) Coping with Candida. Sheldon Press, London 1994.
- Tyrer, P. (1986) How to Stop Taking Tranquillisers. Sheldon Press, London.
Index · Contenu · Introduction · Chapitre I · Chapitre II · Programmes de Sevrage · Chapitre III
Déni Médical · Professor Ashton Index · Original English Version · Autres Langues
© Copyright 1999-2012, Professor C H Ashton, Institute of Neuroscience,
Newcastle University, Newcastle upon Tyne, NE4 5PL, England, UK
© Ray Nimmo · 2012
« retour · haut de page · www.benzo.org.uk »